Denai Moore
Cela fait des décennies que Bobby Womack arpente les scènes du monde entier pour dénicher la perle rare. Une fois encore, il ne s’est pas trompé en allant dénicher Denai Moore. Cette jolie anglaise de 21 ans née en Jamaïque est parvenue à mettre tout le monde d’accord en l’espace d’un EP quatre titres au ton curieusement mature et grave.
Denai définit l’écriture comme une « compulsion » qui date de ses sept ans quand entourée par les instruments de son père, elle tâte du piano, du melodica ou de l’harmonica. C’est quand elle se prend d’une passion définitive pour la guitare que Denai commence à écrire pour de bon. Ses premières chansons sont si étranges et son univers si trouble que personne ne croyait qu’une fillette pouvait composait des chansons aussi profondes. « Venant d’une personne de douze ans, cela pouvait apparaître comme une arnaque. Les chansons étaient tellement profondes que les gens pensaient que mon père écrivait pour moi, mais les idées venaient juste de ce que j’avais vu autour de moi et au cinéma », se rappelle Denai.
C’est à la fin 2012 que Denai se révèle au public avec la mise en ligne de Flaws, un titre venu d’ailleurs qui va foutre un coup de pied dans la fourmilière soul encore orpheline d’Amy Winehouse et qui avait trouvé une nouvelle reine en la personne d’Adèle. Mais elle peut trembler car à 21 ans, Denai Moore possède déjà ce qui fait l’âme et la moëlle de la soul :ses chansons produisent une immédiate et intemporelle catharsis tout au long des quatre titres qui composent son premier opus.
De la gravité de Wolves, au déchirement de l’abandon dans Gone, en passant par l’abandon de Sodade, Denai maîtrise déjà cet art si difficile qui consiste à fondre son âme dans une musique au ton aigre-doux, souvent parcourue d’accès d’euphorie venus de nulle part.
Il serait cependant hâtif de tresser des lauriers à la jeune anglaise, car la musique de Denai Moore en est encore à ses balbutiements, mais une chose est sûre :la soul tient sûrement en elle une de ses futures étoiles. Zack Badji
Illustration: aquarelle de Régine Coudol-Fougerouse