Diana Krall
Diana Jean Krall est ce que l’on pourrait appeler une enfant de la balle. En effet, quand elle vient au monde le 16 novembre 1964 à Nanaimo, en Colombie Britannique ( Canada), la maison familiale est déjà emplie de musique puisque son père, James Krall est un pianiste émérite, tandis que sa mère Adella, morte en 2002 d’un myélome multiple est chanteuse dans un chœur. Aussi c’est tout naturellement que Diana se met au piano à l’âge de quatre ans, et tout de suite, développe une oreille musicale hors du commun, aidée en cela par la collection de musique phénoménale accumulée par son géniteur.
Ce dernier est le premier soufflé par le don de sa fille, et dans une interview de 1997 au journal américain New Jazz, il déclarait ceci : « A cinq ans, je n’avais pas besoin de répéter une suite de notes. Il suffisait à Diana de l’entendre une fois pour la reproduire. Mieux, elle me disait : « et si on faisait comme ça ? » en proposant un autre phrasé, et la minute suivante, je me demandai si elle jouait d’autres notes, tellement c’était mille fois plus beau. »
A l’école, Diana commence à fréquenter un petit orchestre de jazz, et à quinze ans joue régulièrement dans plusieurs restaurants de Nanaimo, et c’est là que les chasseurs de têtes du Vancouver International Jazz Festival la débusquent et lui offrent une bourse pour étudier au prestigieux Berkeley College Of Music ou elle passe quatre à peaufiner son jeu.
Mais c’est sa rencontre avec Ray Brown, ex- mari d’Ella Fitzgerald et ancien bassiste au sein du Trio d’Oscar Patterson qui va bouleverser son destin quand Diana, sur la demande de Brown, accepte de déménager à Los Angeles où elle rencontre le pianiste Jimmy Rowles avec qui elle commence à chanter. Diana attire tout de suite l’attention de producteurs qui la persuadent de les rejoindre à New-York où elle sort son premier album Stepping Out en 1993 avec le bassiste John Clayton et son ami de toujours Jeff Hamilton.
La critique est tout de suite élogieuse à l’endroit de Diana, au point où les producteurs commencent à se bousculer au portillon, et c’est le plus prestigieux d’entre eux, Tommy Lipuma en l’occurrence, qui va finalement convaincre Diana de produire son deuxième album Only Trust Your Heart en 1995, une livraison qui, comme la précédente, truste les premières places des charts.
Même destin pour son troisième disque All For You qui est nominé pour pour un Grammy Award en1996 et figure soixante- dix semaines d’affilée dans le classement jazz du Billboard, et le succès est confirmé quand juste un an plus tard, Diana sort Love Scenes, accompagnée de Russell Malone à la guitare et du merveilleux contrebassiste Christian Mc Bride.
Il faudra attendre 1999 pour voir Diana Krall revenir dans les bacs avec When I Look In Your Eyes qui enregistre la participation de Jonnhy Mandel dont les arrangements intelligents donnent à When I Look In Your Eyes une profondeur et des couleurs magnifiques. Cet album est certainement celui de la confirmation puisque Diana est récompensée par les Grammy Awards qui lui décernent le titre de Meilleure Musicienne de Jazz de l’année. L’Amérique entière réclame alors Diana Krall qui entame avec Tony Benett une tournée qui va les conduire dans vingt villes où le duo fait lever des millions de personnes dans des standing ovations interminables.
En 2001, Diana retourne en studio pour enregistrer The Look Of Love qui contient le titre éponyme écrit par Claus Ogerman et là aussi, Diana recueille tous les suffrages puisque cet album intègre le classement du Billboard et arrive à la première place au Canada où il décroche pas moins de quatre disques de platine.
Son concert mémorable à l’Olympia de Paris en septembre 2001 donne Live In Paris, son premier album live, suivi de The Girl In The Other Room en 2004 (composé avec son mari Elvis Costello). Quand il sort en avril, cet album atteint rapidement le top 5 au Royaume-Uni et figure aussi dans le top 40 des meilleurs albums en Australie. Même le génial Ray Charles tombe sous le charme et invite Diana sur la chanson You Don’t Know Me dans le cadre de son Genius Loves Company, une expérience que Diana désigne comme « le plus grand honneur qu’on ne lui ait jamais fait ».
S’ensuit un long break que Diana met à profit pour donner naissance à des jumeaux en décembre 2006 à New-York et ce n’est qu’en mars 2009 qu’elle se signale à nouveau dans les bacs avec Quiet Nights, un superbe album mitonné à la sauce bossa nova et où transparait l’ouverture au monde d’une artiste au faîte de son art.
Preuve de son nouveau statut de monstre sacré, l’immense Barbara Steisand lui a accordé l’insigne honneur de produire son dernier album, chose qu’elle avait refusée à plusieurs producteurs durant les deux années précédentes.
Aujourd’hui, Diana Krall fait partie de ces rares musiciens qui sont entrés au Panthéon en l’espace de quelques albums. Douée elle l’est sûrement, bosseuse sans doute, mais Diana Krall possède surtout ce supplément d’âme qui fait les vrais génies et donne l’impression de pouvoir nous émouvoir à chaque fois qu’elle pose les doigts sur un clavier de piano. Zack Badji
Illustration: dessin aquarellé de Régine Coudol-Fougerouse